Entretien entre Damien Jean Victor auteur de Les matriochkas du syndrome et le président de l’association Noonan :

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Comment vous est venue l’idée d’écrire un livre ?

Tout d’abord, merci pour l’intérêt que vous portez à cette aventure. Je parle d’aventure parce que c’en est une. L’idée initiale n’était pas d’écrire un livre. Au moment où j’ai commencé à écrire, Axel avait 10 ans, il avait vécu une scolarité compliquée et injuste en primaire et le diagnostic “Noonan” venait de tomber, du moins celui qui nous a permis de sortir du déni. 

J’ai jugé important d’expliquer à ses professeurs du collège de quoi il souffrait et ce que cela pouvait représenter au quotidien. Et plus j’écrivais, plus je me disais qu’il fallait que j’en profite pour répondre aux questions de ceux qui nous demandaient d’expliquer cette maladie rare :  famille, amis, médecins, collègues… 

Le petit texte est rapidement devenu un  manuscrit de 30 pages, difficile à photocopier et à distribuer à mes frais à l’ensemble de ceux qui seraient intéressés. Et surtout, le format lui faisait perdre tout son intérêt. 

C’est une prof de français du collège où je travaille et un jeune auteur de 11 ans qui ont fait naître l’idée de l’éditer.

Peut-on parler d’une biographie familiale ? 

Je ne me suis pas réellement posé cette question. Je n’ai pas écrit dans ce sens. A bien y réfléchir, je ne crois pas qu’on puisse parler d’une réelle biographie. Certes il est question de l’histoire d’Axel qui impacte forcément celle de ses parents et de sa fratrie, mais le but était d’expliquer le syndrome, et au-delà du caractère scientifique que j’aborde très modestement car je ne suis pas un spécialiste, j’ai pensé que rien ne vaudrait mieux qu’un témoignage. 

D’ailleurs, à ce sujet, il faut bien admettre qu’il y a des histoires bien plus tristes que la nôtre et celle d’Axel.

Mettre des mots sur les maux, c’est une sorte de thérapie ? 

Incontestablement oui. Encore une fois, ce n’était pas le but recherché mais poser des mots est libérateur, ça permet de faire le point, ça oblige à une introspection et à une certaine objectivité qui permet de prendre les choses sous un autre angle et de relativiser.

Pourquoi ce titre Noonan : les Matriochkas du syndrome

Les Matriochkas, ce sont ces poupées russes qui s’emboitent les unes dans les autres. J’y ai trouvé un parallèle avec le syndrome de Noonan pour lequel, à chaque diagnostic, on découvre un nouveau trouble caché.

Comment Axel et le reste de la famille ont-ils accueilli votre volonté de faire un livre ? 

Pour la maman d’Axel, il y a d’abord eu le frein de la pudeur : tout le monde n’a pas besoin de connaître notre vie. L’argument décisif s’est posé sous forme de question : « Si nous avions eu un livre à notre disposition, expliquant ce que c’était et proposant un témoignage, est-ce que cela ne nous aurait pas aidés ? »

Quant au frère et à la sœur d’Axel, ils y figurent très peu et je pense qu’ils ont davantage vécu l’édition de ce livre comme une curiosité… Tout le monde ne peut pas se vanter d’avoir un papa qui publie un livre ! (Rires)

Avez-vous eu des retours ?

Oui, je n’ai eu que des retours positifs, à l’exception d’une personne qui a trouvé que le « roman » n’était pas bien construit ; mais il ne s’agit pas d’un roman. 

Le plus beau retour, c’est celui d’Axel. Après que je lui avais lu le texte deux fois, je lui ai demandé pourquoi, à chaque fois il pleurait. Sa réponse : « Parce que je trouve incroyable ce que tu as fait pour moi. » Ça ne vous remuerait pas, une réponse comme celle-là ?

Est-ce que votre livre a aidé votre fils à comprendre ce qui lui arrivait ? 

Il faudrait lui demander. Je crois que ce qui a pu l’aider, c’est notre présence, le dialogue et la transparence de nos propos. Le livre a été un outil qui lui a peut-être permis d’avancer… Ce qui serait intéressant, c’est que ce bouquin puisse aider d’autres familles à avancer.

« La vie, ce n’est pas d’attendre que les orages passent, c’est apprendre à danser sous la pluie » écrivait Sénèque. Diriez-vous que votre livre vous a aidé à traverser cet orage ? 

Dire les choses est parfois douloureux, les cacher n’est à mon sens qu’un sursis à une douleur plus grande encore.

Mon livre m’a aidé à dire les choses. 

Et si s’était à refaire ? 

J’écrirais peut-être différemment, il y aurait sans doute de nouvelles données récoltées depuis et de nouveaux chapitres tournés vers d’autres témoignages, mais une chose est certaine, je le referais sans aucune hésitation.